Où aller ?
« Le vagabondage à pied est une chose sainte »
Maurice Chappaz, in ‘Le Grand Saint Bernard’
Motivations
Quand Dieu donne le départ :
La « motiv » pour la marche n’était pas forcément beaucoup plus développée dans l’Antiquité qu’aujourd’hui…
Le départ des premiers marcheurs bibliques est souvent dicté par Dieu lui-même. Le Ps
136,16 nous dit et répète qu’il le fit «car éternel est son amour »,
mais le « Va, quitte ton pays » (Gn
12,1) adressé à Abraham ne fût certainement pas très simple à
exécuter ! Il ne lui indique pas trop dans quelle direction partir, mais
la nécessité de se mettre en route et de se laisser guider !
Impulsions plus ou moins discrètes :
L’errance
est d’ailleurs une caractéristique de ces premiers temps, qu’il s’agisse du
« mon père était un araméen errant» (Dt
26,5) ou de l’errance de celui qui s’est perdu. Mais elle n’est pas
vagabondage désordonné ; Dieu conduit discrètement celui qui se laisse
mener à travers ces expériences.
Le plus souvent c'est la faim qui guide les marcheurs de l'Ancien Testament vers de nouvelles terres (Gn 12,10 ; Gn 42,5 ; Rt 1,1 ; 2R 8,1…). Et même, dans le Nouveau Testament, elle provoquera le retour du fils prodigue: Lc 15,11-24. Ensuite c’est la présence d’eau ou d’un campement qui va guider le choix des étapes. Les croyants de la Bible voient dans ces itinéraires erratiques une sorte de radioguidage de la providence qui utilise les voies humaines pour tracer son plan.
D’autres fois l’orientation est plus directe, de la bouche même de Dieu (Gn 31,3 ; Dt 1,40 ; Dt 2,3 ; 1R 17,2-3 ; 1R 17,8-9 ; Jon 3,2-4…).
Fuites :
Il arrive aussi que l’homme se mette en route pour fuir au désert, fuite de la calomnie par exemple dans le Ps 55,7-8, pour se cacher un temps (Jos 2,16), ou par peur dans le cas d’Elie (1R 19,3). Tentations toujours bien actuelles… ?
Jésus, lui, refusera toujours la fuite : quand on lui propose d’échapper à Hérode, il rétorquera : « je dois poursuivre ma route » (Lc 13,31-33). Et à son arrestation, il sera le seul à ne pas fuir (Mc 14,42-52p).
Les ‘chemins’ et ‘sentiers’ foisonnent dans la Bible (respectivement 350 et 66 fois) : impossible d’en dresser la carte ici ! Notons qu’ils s’opposent assez à nos raidillons de montagne et se rapprochent plus des sentiers aménagés à grands frais par les Offices du Tourisme pour la ballade populaire : les rédacteurs les aiment aplanis, préparés, prophétisant ainsi un retour de l’Exil facile et en masse (Is 45,2 ; Is 49,9-11), ou l’arrivée sans encombre d’un Sauveur (Is 40,3-4 actualisé par Lc 3,2-5p ; Jn 1,23). Si Jean-Baptiste est le chef de chantier chargé de préparer les sentiers pour Jésus (Lc 1,76), on trouve aussi comme contremaîtres es préparation de sentiers la Justice (Ps 85,14) et Dieu lui-même qui se met à la tâche (Is 45,2 ; 1Th 3,11). Hormis la conversion des cœurs attendue, et le fait que la foi déplace les montagnes (Mt 17,20), on ne sait pas très bien pourquoi il était si nécessaire de raser les montagnes et combler les vallées pour accueillir le Messie : il n’était pas annoncé en jet privé, mais sans doute ne l’imaginait-on pas tellement bon marcheur et préférait-on l’accueillir avec les honneurs du « tapis rouge » dû aux dignitaires… Et pourtant, même s’il n’a jamais montré de prouesse exceptionnelle à la marche, Jésus les a parcourus et reparcourus ces sentiers de montagnes et de vallées !
A travers l’eau et le feu :
Mais on ne marche pas que sur sentiers dans la Bible. On y marche aussi prophétiquement à travers le feu (Is 43,2 ; Ez 28,14 ; Dn 3,24) ! Heureusement les Proverbes incitent quand même à la prudence (Pr 6,28) !
Et outre les traversées "à pied sec" des mers et rivières, on trouve encore une certaine obsession à marcher à travers les eaux (Ex 14,29), et même à y tracer des sentiers (Ps 8,8 ; Sg 14,3) ! L’avantage de ces « sentiers de Dieu » est qu’on n’y laisse pas de traces (Ps 77,19): Dieu marche mais passe inaperçu ! Peut-être est-ce sur ces "sentiers des mers" que Jésus apprit à marcher sur les eaux (Mt 14,25-26 ; Mc 6,48-49 ; Jn 6,19) ?
La peur de s’égarer :
Le peuple hébreu a connu le
sentiment d'être perdu, désorienté au désert (Ps
107,4-7 ; Sg
5,6-7). On peut imaginer que cela aura inspiré les images ultérieures de
l'égarement à pied (Pr
7,25 ; 12,26
; 21,16 ;
Is
3,12 ; 35,8 ;
Jn
12,35).
L’égarement provoque souvent, comme toute peur, un cri vers Dieu. Il est de ces instants où même l’indifférent à la foi se rappelle au bon souvenir du Père : « Je m’égare, viens me chercher ! » (Ps 119,176). C’est le thème de la brebis perdue en Ez 34,1-16 et dans la note correspondante de la Bible de Jérusalem, renvoyant notamment à Mt 18,12-14 et Lc 15,4-6. Jésus peut parler de la brebis perdue, car enfant il a lui-même fait marcher ses parents à sa recherche (Lc 2,41-45) !
Orientation globale :
L’apprentissage de l’orientation se fait jeune au désert, et se transmet oralement de génération en génération. Il n’est pas rare aujourd’hui encore, dans une marche avec des touaregs, de voir un jeune chameau ou le fils du guide embarqués à titre d’initiation : on apprivoise le terrain en le parcourant ! L’image est reprise par le Ps 25 (« enseigne-moi tes sentiers ! »), que l’on peut considérer comme le Psaume de l’initiation aux voies et sentiers.
Plus tard le jeune homme (Ps 119,9) et l’homme devront suivre avec fidélité les sentiers enseignés ou tracés (Ps 17,4-5) : on a là une sorte de balisage divin avant l’heure des ‘GR’ !
Lorsque le balisage disparaît, il n'y a plus qu'à se renseigner (Jr 6,16) auprès de l'autochtone, qui connaît aussi les bons plans pour éviter les ennuis (cf. Rahab en Jos 2,16 ; Jc 2,25). C'est ce que firent les Mages s'enquérant auprès d'Hérode dès que l’astre cessa de les guider (Mt 2,1-12), mais celui-ci s'avéra filou. C'est alors Dieu qui par ses songes se charge de remettre dans le droit chemin (Mt 2,12). Et à Thomas désorienté par le départ de Jésus, celui-ci se présentera comme l'homme fait chemin, l'orientation par excellence, celui qui donne le sens (Jn 14,5-6), la boussole de toute vie.
Mais connaître la direction globale ne suffit pas. Le problème est classique mais lourd de conséquences pour le marcheur : se retrouver à une bifurcation, savoir qu’un chemin est le bon et que l’autre mène à perpette, et devoir choisir. Pour le croyant, l’image des « deux voies », bien et mal, vie et mort, est un thème biblique majeur, qui traverse tout le Livre : Dt 30,15-20 ; Pr 4,18-19 ; Pr 12,28 ; Jr 21,8 … Le sens est parfois imagé, mais invite dans des choix d’orientation concrète décisifs à ne pas les faire sans Dieu (Ps 119). Et l’image a sûrement pris aux tripes les marcheurs contemporains de la Bible, quand ils entendaient par exemple que le chemin le plus large peut mener à la mort alors que c’est le sentier étroit qui mène à la vie (Mt 7,13-14) !
Savoir faire
demi-tour :
« Il faut savoir renoncer ! ». Pas toujours facile à admettre ! Imaginez le peuple hébreu, arrivé aux portes de la Terre promise, auquel Dieu demande sèchement de faire demi-tour et de renoncer au but de 40 ans de marche (Dt 1,35-2,3) !
Renversement de situation ou relecture raisonnée de l’expérience de l’Exil ? Convaincu de l’impasse de l’Exil à Babylone, c’est le peuple hébreu qui implore cette fois Dieu de le ramener « au rocher trop éloigné pour lui », celui du Temple de Jérusalem (Ps 61,3 ; Jr 50,5). Retour qu’il ne pouvait faire seul, que Jérémie prophétisait dans les larmes (Jr 50,4), et décrit après coup dans la joie (Ps 126). Nous en retiendrons que l’idée de faire demi-tour, surtout après un « échec », n’est jamais réjouissante, mais une fois revenus à bon port, les bons souvenirs prennent heureusement le dessus !
Plus désagréable est l’idée de devoir faire demi-tour parce que l’on a oublié quelquechose, son appareil photo ou sa gourde. Mais l’Evangile nous rappelle que parfois nous avons oublié… de remercier, tel cet unique lépreux qui rebrousse chemin pour rendre grâce à Dieu (Lc 17,11-19) !
Il est surtout une très belle parabole biblique du « ne pas avoir honte de faire demi-tour »: le retour du fils prodigue vers son point de départ (Lc 15,11-24). Et nous, comment accueillons-nous le compagnon de marche qui s’est trompé et sait renoncer ou rebrousser chemin ?
Ou ne pas revenir en
arrière ?
La Bible est vraiment à l’image de la marche, avec ses contradictions apparentes. On nous parlait de savoir faire demi-tour, voilà que Yahvé demande à l’homme de Dieu de ne pas revenir sur ses pas, sous peine de mort (1R 13,7-25) ! Un songe informe encore les mages de retourner par un autre chemin (Mt 2,12). Et la Bible insiste beaucoup sur l’importance d’aller droit de l’avant (Ph 3,12-16) et de ne pas regarder en arrière (Gn 19,17 et 19,26 ; Mt 24,16-20p ; Lc 9,62). Il n’y a en fait pas plus de règle générale en matière de marche biblique que de randonnée : à chaque cas la réponse adéquate ! Les conseils aux randonneurs peuvent donner des orientations de prudence générales, tout comme Dieu donne une ligne de vie, le comportement à adopter ne se dévoile que sur le terrain, et en toute fin l’homme reste totalement libre et responsable !
Sur la bonne voie !
« La
voie » :
Des « deux voies »
de l’Ancien Testament et même du nouveau, on passe après Jésus-Christ à
l’expression de « La Voie », qui désigne les chrétiens et l’Eglise dans les Actes des Apôtres (18,25-26 ;
24,14 …).
Le choix a été fait, le but peut-être pas encore atteint, mais déjà émerge un
chemin de vie à la suite du Christ. Une belle image théorique me
direz-vous ? Pas si sûr : la première action des apôtres dans leur
mission d’Eglise fût bien de se mettre concrètement en marche… pour parcourir
le monde antique (Ac
20,13).
La voie
supérieure :
Le thème du chemin ou de la voie
pour arriver au but juste est récurrent dans la Bible et souvent imagé. Mais il
ne saurait dispenser le marcheur de vivre cette démarche avec ses pieds et avec
ses tripes. Ainsi St Paul reprend-il l’image pour annoncer une voie plus
excellente que les autres : la charité (1Co
12,31-13,13).
L’approche du but !
« L’espérance est la vertu du
marcheur » Claude Ducarroz
Avec
l’approche du but augmentent l’impatience de l’arrivée (Ps
84,2-3) et l’allégresse dans la marche (Ps
84,6-8 ; Ps
122,1 ; Ps
126). Il aura fallu la libération de l’Exil pour la voir se
manifester ! Plus prosaïquement, le retour vers Jérusalem s’est sans doute
vécu comme un long pèlerinage d’espérance, la marche s’accompagnant de la
récitation ou du chant des Psaumes des montées (Ps
120 à 134).
Pour Jésus aussi Jérusalem marquera le but de ses pérégrinations,
chez Luc notamment : Lc
13,33.
Et
voici le cri de soulagement et le chant de
joie poussés par les déportés au terme de leur marche, Jérusalem : « Enfin nos
pieds s’arrêtent ! » (Ps
122,2).
Mais
pour Jésus, l’accomplissement de son parcours à Jérusalem marque aussi son
‘heure’, celle de la gloire, mais par sa vie
donnée, son élévation sur la Croix (Jn
17,1 ; Jn
19,30). On pensera peut-être à ces
alpinistes parvenus à la gloire sur un 8000 sans retour, au prix de leur vie.
Mais bien timide image devant celle du Christ sauveur !
Et vous, êtes-vous
arrivés au but ? Sinon, avant de conclure cette marche, reprenez-là où vous l’avez laissée !
Relectures de parcours :
On aime après une journée de marche revisionner sur la carte le parcours effectué, ou après une longue randonnée s’en rappeler les moments forts en regardant les photos. Après un camp ou un pèlerinage, on organise volontiers une soirée dias pour tenter de rendre compte à son entourage de ce que l’on a vécu, même si cela est désespérément impossible !
Les personnages bibliques aussi ont relu leurs marches. L’itinéraire de l’Exode résumé comme un trait de crayon sur la carte en Nb 33 étonne par sa complète différence d’avec l’itinéraire patiemment reconstituable à partir des livres précédents : sans doute a-t-on là le témoignage fossile de deux exodes différents. Le Ps 107,4-7 nous dresse même un fulgurant raccourci des méandres de l’Exode, ramenés à un « droit chemin » !
La Sagesse aussi aime relire le parcours du peuple de Dieu : de la marche de Jacob elle dira que «la Sagesse le guida par de droits sentiers » (Sg 10,10) !
Au sommet de ces relectures de parcours, il y a bien sûr l’épisode des disciples d’Emmaüs (Lc 24,13-35). Il aura fallu le compagnonnage de Jésus en chemin pour pouvoir relire tout le sens de l’histoire sainte, à la lumière de la résurrection !
Relecture
d’épopées :
Avec 2000 ans de recul supplémentaires, ces parcours bibliques peuvent nous apparaître comme de lointaines épopées des pionniers de Dieu. Mais l’Eglise continue de nous proposer des relectures du parcours de l’histoire sainte, adaptés à notre recul, comme cette relecture de carême ou ce commentaire réformé.
La relecture de parcours est aussi une expérience qu’auront faite bien des engagés en relisant leur vie et comment Dieu les a amenés, par des moyens étonnants, à découvrir leur vocation : l’histoire de chacun est une histoire sainte, une marche sainte ! En effectuant notre propre relecture de parcours, pourrons-nous dire avec Claudel et Stan Rougier « Dieu écrit droit avec des lignes courbes » ou comme le psalmiste le suggérait « Dieu marche droit avec des parcours sinueux » ?
"La gloire de Dieu, c'est l'homme debout", Irénée de
Lyon, IIème siècle
Regards sur notre
randonnée :
Notre
cyber-randonnée biblique n’est évidemment pas le seul parcours biblique
possible : allez faire à l’occasion ce pèlerinage
dans la Bible proposé par les
Assomptionnistes, suivant un itinéraire progressif. Mais revoyons avec recul l'itinéraire de
notre marche :
Dans le récit mythique des origines la marche avait commencé bien piètrement par l’animal à ras de terre. Trois millénaires avant notre ère on n’était d’ailleurs pas très loin de la vérité scientifique moderne. Appelé à la verticalité, l’homme s’est lui fièrement mis sur pieds et a déjà accompli ses premières grandes marches.
Dieu veut l’homme debout : il s’attache à guérir l’aveugle, redresser l’handicapé, faire marcher le paralytique, bondir le boiteux, se lever les morts ! Dieu ne veut jamais l’immobilité forcée. La marche devient prophétique !
Cela en dit long sur les conditions d’accès à la marche avec Dieu. Les guides font le point sur les aptitudes du ‘client’ ; les brochures d’agences de trekking annoncent la difficulté avec un petit symbole de 1,2 ou 3 chameaux ; les Hautes Routes du Grand Saint Bernard ont des codes de pénibilité et de technicité ; Dieu laisse l’homme se poser la question « qui pourra gravir la montagne de Dieu ? » Et il enchaîne sur la réponse (Ps 24,3-4), déroutante pour le marcheur: « l’homme aux mains nettes, au cœur pur » ! L’aptitude à la marche n’est pas question de pied ferme et de pas assuré, ni de talc d’escalade et autres équipements, ni de cœur inquiété par tous les conseils aux randonneurs. Elle est dépouillement des mains et du cœur ! Pas de fitness et de gymnastique pre-stretching non plus SVP ! Dieu n’a rien à faire d’athlètes grecs ou Hollywoodiens : Ba 2,18 !
Le marcheur idéal apparaît alors en la personne de Jésus, ployant sous le poids de la Croix qui le mènera au but. A sa suite, nous sommes aussi invités à porter la nôtre (Mc 8,34p), le sac à dos de notre vie : pesant parfois, mais aussi soutien et liberté de notre marche.
Aller jusqu’à
l’horizon
Notre marche ne fut pas du tout linéaire. Le surf biblique nous a fait prendre parfois des raccourcis foudroyants entre l’Ancien et le Nouveau Testament, les prophéties et leur accomplissement, une image et ses évocations antérieures… Et pourtant à travers ces sinuosités (nous ne serons peut-être pas deux à avoir accompli le même parcours), un sens s’est dessiné : Dieu écrit droit avec l’histoire tortueuse de chacun.
Une évolution s’est profilée, un sommet nous est donné à contempler ; nous sommes tout près, au camp de base peut-être ; et maintenant ? Qui ne voudrait au terme d’un premier trek rêver d’un nouveau but plus haut, passer de la marche horizontale à l’ascension verticale, envisager le sommet ? Il nous faudra mourir pour cela, ne soyons donc pas pressés. Mais déjà risquer notre vie, oui !
Faut-il redescendre ? Oui,
peut-être, à chacun de répondre. Mais ne transformons pas l’élévation en
régression ! Les tentations sont grandes : l’homme debout, prototype
de la rencontre, communique de plus en plus assis, par la distance d’un réseau…
de câbles ; il voyage assis, seul au volant d’une
Renault-« Espace » vide ; il meurt, dans 99% des cas, allongé,
dans un lit. Obèse de biens, il finira peut-être, comme le serpent de la Genèse
(Gn
3,14), par marcher sur son ventre…
Ne réécrivons tout de même pas trop vite la fin des temps ! L’homme a aussi une tête, il sait réagir ; il redécouvre paradoxalement le goût de la marche au cœur de la modernité facile, après tant d’efforts pour s’en passer… Ce n’est certes pas l’Exode, même si quelques illuminés ont réalisé le très beau rêve de vérifier par leurs pieds que la Terre était ronde. On est pour beaucoup à l’ère de la ballade du dimanche, qui ne date pas d’hier : avant le péché, Dieu faisait sa petite promenade matinale dans le jardin d’Eden (Gn 3,8) ; depuis il doit avoir peur de l’homme et c’est Satan qui aime flâner sur Terre (Jb 1,7 ou 2,2) ! Les servantes de Pharaon aimaient se promener au bord du Nil (Ex 2,5) et Isaac, lui, appréciait les ballades du soir dans la campagne (Gn 24,63). La ‘ballade du dimanche’ trouve peut-être elle-même sa racine biblique dans la ‘distance d’un chemin de sabbat’ d’Ac 1,12 !
Restons-en là ! La marche-loisir est le prélude à toutes les autres.
Dieu se dit aujourd’hui dans les loisirs. La foi rentre par les pieds,
humblement. Mais il nous fallait peut-être tous les pas et les pas de nos
co-bipèdes pour parvenir à ce qui est pour moi le cœur et le sommet de la
révélation biblique: Dieu est venu marcher humblement avec nous pour nous
amener chez lui. Si cette randonnée t’a fait comprendre qu’il a revêtu tous les
aspects concrets de la marche pour que ce ne soit pas que de la parlotte mais
une Parole donnée, une Parole avec des pieds, sur Terre, alors tu peux ouvrir
la dernière fenêtre du site, celle qu’on n’a le droit d’ouvrir qu’après avoir
ouvert toutes les autres. La dernière fenêtre est toujours la plus grande et la
plus belle, car elle ouvre sur l’horizon, la ligne de
perfection, celle que Jésus a donnée aux jeunes hommes riches en quête
de bonheur que nous sommes (Mt
19,21). Mais dont le prophète avait déjà annoncé la saveur :